GASTOUNET – Manade Saint Pierre
Vous vous souvenez de moi ? Revenons un peu sur mon histoire…
Maman était Lagarde, Papa un bel étalon de Fanfonne Guillerme. Ce mariage me vit naître en 1997, et j’arbore quelques années plus tard le numéro 703. Je possède d’ailleurs une carrure très imposante, et un grand berceau de cornes. Au début quelconque, je me demandais bien ce que voulaient ces tenues blanches qui passaient plutôt rapidement sous mon nez, alors, j’analysais. Parfois je lâchais les cites, je partais sur un tourneur… Il m’arrivait même de sauter dans le pourtour pour revenir seul en piste, attitude que j’ai gardée tout au long de ma carrière.
Je sors très jeune dans les arènes d’Aigues-Vives, pour la fête votive, pays natal de mon pélot. Le matin déjà, lors du débarquement, j’inflige un coup de corne au bras de Christian (je n’ai pas vraiment fait exprès, je le promets). Il a dû se rendre à l’hôpital et je le prive de la course. Je me révèle très bon, voir « intouchable » tel qu’on le lui rapporta, rentrant ma cocarde, et on décide alors de m’appeler « Gastounet », clin d’œil à un Président de la République du début du siècle, Gaston Doumergue, natif également du village.
Ce fut le top départ de belles années, fantasques et spectaculaires à souhait, tant la puissance des coups d’éclats que je faisais éveillait l’émotion. Ma toute première explosion aux planches d’ailleurs, c’était une envolée, que j’ai signée aux trousses d’Olivier Ruiz. Je gagne la finale des courses de protection à Mauguio en 2002 et continue ainsi mon ascension. Généreux au possible, je me suis toujours très impliqué au combat mais je savais me montrer sélectif ! La bourre, ça n’était pas mon truc, et je ne manquais pas de le faire savoir à mes assaillants.
Une fois à Palavas les Flots, juste avant que la trompette ne retentisse pour que je retourne au toril, un grand raseteur du nom de Sabri Allouani me fait face. Je reste très près de lui jusqu’aux planches que j’occulte complètement ! Résultat : porte et pilier au sol, cassés, mais encore une fois, mon impulsivité m’a emporté sans crier garde. Je rentre ce jour-là sous l’ovation générale. Je passe juste après mon ami Camarina de Chauvet dans l’amphithéâtre arlésien, qui avait été excellent, et j’ai tenu ma place de dernier avec brio.
J’ai eu la chance de travailler dans toutes les grandes arènes, telles que Châteaurenard, Lunel, Vauvert, Beaucaire, Arles…, mais je n’ai jamais participé à une finale car Christian ne tenait pas à ce que je les fasse. Il faut dire que je me suis beaucoup blessé ! Quand je sortais, il ne dormait pas apparemment tant le risque était considérable. J’ai été opéré au moins quatre fois de la mâchoire qui, aujourd’hui encore, reste marquée.
Mon genou a souffert aussi des arènes pescalunes. Et puis j’en ai fait souffrir moi aussi… J’ai une pensée pour Benjamin Villard, mon plus fidèle adversaire, à qui j’ai compromis la suite de carrière sur ce coup énorme à Châteaurenard. Je faisais aussi bien la paire avec Hadrien Poujol.
Je me reposais tranquillement sur les terres sableuses de La Félicitée au Grau du Roi, été comme hiver, je n’avais plus vu les pistes des arènes depuis 2010, date à laquelle j’effectuais ma dernière saison, avec des despedides à Eyragues et Aigues-Vives, là où tout a commencé. Même si les mouvements deviennent difficiles, avec un corps marqué par tant de générosité pour vous faire plaisir, je parviens encore à me soulever et me mettre debout pour saluer mes visiteurs.
A l’ombre, au frais, je me remémore tous ces souvenirs, du grand taureau que j’étais, moteur de la notoriété de mon élevage.
Depuis ce texte, je ne suis plus là… je suis partis rejoindre mes congénères dans le paradis des taureaux en 2019. Mais je suis sur que vous vous souviendrez de moi… Texte : Toril TV – AM
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