ROMAIN GROS : SA VIE DE PASSIONNÉ

ROMAIN GROS : SA VIE DE PASSIONNÉ

Caractère de battant, parfois prononcé, déterminé, souvent sans limites et audacieux…le raseteur s’est fréquemment distingué sur le sable des arènes. A l’aube de ses dernières années de piste, Romain Gros se livre sur un rôle qu’il a pris très au sérieux, celui de poissonnier, qu’il exerce à « Saint-Louis Pêche », d’Éric et William Manoukian, dont les commerces se trouvent à Maussane et Saint Martin de Crau. Rencontre avec un entier de cœur.

  • Comment es-tu devenu poissonnier ?

Je cherchais un travail de matin. À la base, je ne m’y connais pas du tout en poissons. J’ai commencé avec Saint-Louis Pêche en 2011. J’ai arrêté une année, car j’avais un bar à Fourques, et puis j’y suis revenu. J’ai appris le métier sur le tas, au fur et à mesure, et il m’a fallu acquérir de l’expérience pour arriver à tout ce que je fais aujourd’hui au sein de cette entreprise. J’y passe beaucoup d’heures, mais je pense que peu s’investirai comme je le fais. 

  • Quelle est ta journée-type de poissonnier ?

Le matin, j’arrive à 4 heures à la poissonnerie. Je sors toute ma chambre froide, j’étale mon poisson tout en respectant sa fraîcheur. Je prépare ensuite les commandes-restaurants que nous servons et les départs pour les marchés. Enfin, je fais la vente au magasin de Saint Martin de Crau, dont je suis responsable, jusqu’à 13 heures. Je vais aussi acheter le poisson à la criée une fois par semaine, je remplace mes patrons qui me font totalement confiance. Le mardi est souvent ma plus grosse journée, mais j’ai un emploi du temps que j’arrive à adapter en fonction de la garde alternée de ma fille.

  • Comment expliques-tu ces responsabilités ?

Je suis le plus ancien, j’ai connu l’entreprise alors qu’il n’y avait pas encore les deux magasins. J’ai vraiment pris à cœur ce travail. De plus, j’ai toutes les cordes à mon arc, je vais pouvoir travailler avec les restaurants, acheter le poisson en criée, mais aussi le préparer pour la vente…

Parfois, il m’arrive de faire des erreurs sur le choix de la qualité du poisson. En quelques secondes à la criée il faut regarder le nombre et le prix du kilo, faire une division pour connaitre le calibre du poisson et évaluer si ça vaut le coup ! ça n’est pas mon argent donc c’est délicat. Pour autant, je suis autonome et c’est une récompense. J’aime les responsabilités et j’aime innover. Mes patrons ne sont pas beaucoup démonstratifs donc je cherche constamment à me dépasser. Un peu comme dans les taureaux.

  • Justement, parles nous des taureaux et de tes meilleurs souvenirs :

J’ai connu les taureaux à 16 ans, non par mon frère Jacques Estevan mais par mes amis. L’un d’eux m’a amené chez Chapelle lors d’un entraînement. C’est cette sensation d’adrénaline qui m’a plu. Je suis sorti de l’école taurine de Salin de Giraud, et j’en suis très fier. Je me souviens ensuite des trophées phares de l’Avenir tels que le Gland d’Or ou la Margueritte d’Or. Mais aussi la Cocarde d’Or 2010 où je participais alors que je n’étais pas encore au niveau supérieur. A l’entracte, je suis ex-aequo avec Benjamin Villard qui est mon ami. J’étais tellement sûr de moi que rien ne pouvait m’arriver. 

  • Comment te caractérises-tu dans ta vie de raseteur et de poissonnier ?

À la criée, c’est comme en course camarguaise, quand tu partages un gâteau à 12, ce n’est pas comme si tu le partageais à 15 (rires). Aux taureaux, je pense qu’il m’a manqué un peu d’individualisme. J’ai été bercé dans le football et l’esprit d’équipe. Il aurait fallu des personnes pour me gérer un peu aussi car je m’emportais vite. Mais je pense que la course camarguaise m’a apporté ce que je devais avoir. Ma priorité, c’étaient les belles actions, faire plaisir au public et aux clubs taurins, comme au sein de la poissonnerie. Un employé qui te fait tout de A à Z, ça n’a pas de prix dans une entreprise. Finalement dans ma vie, ce qui m’importe le plus, c’est d’avoir ce retour positif des gens, cette reconnaissance. Je pense que ça vient beaucoup de ma jeunesse…mon papa est parti durant trois ans du domicile familial, certains repères ont manqué.

  • Qu’en est-il de ta carrière de raseteur aujourd’hui ?

En 2019, après six années au trophée des As, je suis au trophée Honneur (groupe 2, ndlr). Je sais que j’ai une place de « vétéran ». Si ça n’est pas ma dernière, ce sera mon avant-dernière saison. Je songe à m’arrêter et j’aimerais que ce soit à Noves. Lors de ma finale des protections en 2007, Arnaud Fesquet m’avait pris sous son aile. C’est l’une des satisfactions de ma carrière : l’ensemble des amis que je me suis fait là-bas. Par contre, je n’envisage pas de faire tourneur par la suite.

  • Et comment vois-tu ton évolution dans la poissonnerie ?

A l’heure actuelle, je suis content de travailler pour un employeur qui ne triche pas. On sait ce qu’on achète et surtout ce qu’on vend. Le rapport avec les gens et leur satisfaction sont des priorités pour moi. Certains ne viennent que le matin car ils savent que j’y suis, j’essaie toujours d’avoir une attention à leur égard. C’est ça le commerce de proximité. Mon travail est réellement devenu une passion. Là je reviens du Portugal, je suis allé voir les criées. Je regarde la manière de travailler, j’apprends des autres cultures.

Cependant, à 31 ans, je suis en pleine réflexion. Je n’exclus pas le souhait de voler de mes propres ailes un jour. J’ai beaucoup d’ambition.

  • Ton coup de cœur ?

La noix de Saint Jacques : je la décortique sans garder le corail. Je fais fondre une noix de beurre, je la fais juste saisir, j’ajoute de la crème et un peu de curry !

 

ROMAIN GROS, dernière année en tant que raseteur : »une histoire d’amour et d’amitié depuis près de 14 ans qui se terminera en fin d’année »

Le raseteur Romain Gros a annoncé via les réseaux sociaux, sa dernière saison en tant que raseteur.

« Une histoire d’amour et d’amitié depuis près de 14 ans qui se terminera en fin d’année . Je vous annonce donc par ce post ; que cette année sera ma dernière saison de « raseteur » ; une décision prise avec beaucoup de recul et de réflexion .
La course camarguaise animait mes week end depuis plus de 15 ans , une réelle passion est née autour de la « Bouvine » et de la « fe di biou » ; des rencontres inoubliables ; des discours et des courses qui seront des souvenirs et des moments gravés à vie dans ma mémoire .

Une relation privilégiée avec toi qui prendra fin le 24 octobre 2020 ; toi que j’ai pu côtoyer de près , voir de très près .
Je t’observes parfois , je te regarde souvent ; les yeux dans les yeux , tes yeux souvent noirs vifs où il est impossible de trouver le moindre indice pour t’affronter . Tu m’a toujours épargnés de tes nombreux coup de folie même si j’ai parfois goûté à tes cornes ..
Alors je te donne rendez vous pour notre ultime saison tout les 2 qui s’achèvera dans les arènes de Noves le 24 octobre prochain .

AMISTA , romain  »